SANTÉ DE L'OCÉAN
René Quinton - pionnier des sciences de l'océan - et il y a d'autres dans nos pages.
   
Le Plasma de Quinton (Plasma Marin)
en thérapeutique des Nourrissons
 
(Le dispensaire marin)
 
par Le Dr. J. JARRICOT
 
Extrait de: Dr. J. Jarricot, Le dispensaire marin, Paris, Masson 1924
 

 
LES MÉTHODES D'EXAMENS, DE SURVEILLANCE ET
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

   
LES MÉTHODES D'EXAMENS, DE SURVEILLANCE ET 
DE CONTRÔLE AU DISPENSAIRE MARIN 
 
Sans vouloir limiter le domaine immense de l'action du Plasma Marin, le dispensaire marin, l'organisme de puériculture dont je m'occupe s'intéresse surtout:
 
  • Aux troubles chroniques ou aigus de la nutrition des nourrissons; retard de croissance (hypotrophie, dysthrepsie), arrêt de développement (atrophie, athrepsie).
 
  • Aux troubles chroniques ou aigus des fonctions gastro-intestinales (entérites,  dyspepsie) et leur cortège de vomissements et de diarrhée, catarrhe intestinale suraigue (choléra infantile).
 
  • Les cachexies spécifiques; les manifestations ganglionnaires, osseuses et cutanées de la tuberculose; les maladies de la peau en général, l'eczéma du nourrisson en particulier.
 
De très nombreuses maladies ont été traitées actuellement de façon systématique et avec des résultats excellents par le Plasma Marin. On peut citer parmi les principales: les anémies, le lymphatisme et la scrofule, les maladies de la peau, les tuberculoses, les affections du système nerveux, les affections gastro-intestinales chroniques.
 
Dans les anémies, le lymphatisme et la scrofule, les tuberculoses osseuses et cutanées, Jovane et Pagano ont observé des guérisons rapides et durables. Bourganel et de La Prabe ont confirmé ces résultats. J'ai vu, moi-même, guérir sans récidive, des adénites anciennes et fistuleuses.
 
Dans le domaine des maladies de la peau, Vartor et Quinton ont apporté à l'Académie de Médecine de belles observations et la méthode de traitement de l'eczéma. Le psoriasis, maladie dont on connaît la ténacité, serait guéri dans la moitié des cas. Sur le terrain du système nerveux, Marie et Pelletier, Robert Simon et Quinton, Plantier et de nombreux auteurs ont enregistré les meilleurs effets dans les paralysies, la neurasthénie, la gynalgie, etc. Dans la tuberculose pulmonaire, les avis sont partagés: mais n'est-ce pas le cas de tous les médicaments actifs? Ce qui est sûr, c'est que des 1905, de remarquables succès, obtenus par Quinton et Robert Simon, ont été présentés à l'Académie de médecine par Chauffard et que, depuis, de nombreux travaux ont confirmé ces résultats, ceux notamment de Foumel, de Mathieu, de Jovane, de l'Agano, de Carles, de Védy, de Fumoux, etc. Dans les entérites, de même dans les poussées de colite muco-membraneuses comme dans la constipation chronique, les observations de Robert Simon et de Quinton, de Bourganel, d'Amyot, ne laissent aucun doute sur l'efficacité de la méthode marine.
 
Je déconseille l'emploi de l'eau de mer pure, son injection est douloureuse et détermine des réactions inutilement violentes. J'utilise toutefois à peu près indistinctement (sauf dans le cas des eczémas, dans les injections intra- rachidiennes, dans les cas de doses massives), deux dilutions d'eau de mer. L'une isotonique (2 parties d'eau de mer pour 5 parties d'eau pure, c'est le Plasma de Quinton (Plasma Marin ou Ocean Plasma). 
 
   
L'eau de mer peut être d'abord donnée en boisson au nourrisson vomisseur, notamment dans les formes graves de l'entérite cholériforme où l'on peut observer, au début du traitement marin, une intolérance absolue pour le lait, mais sous l'influence du traitement marin, cette intolérance n'est que passagère.
 
J'ai administré l'eau de mer aux nourrissons par une distillation intra-rectale goutte à goutte à la Murphy. La vitesse d'administration 13 gouttes par 15 secondes ou 50 grammes par 15 minutes. Cette méthode n'est pas à négliger dans le cas où l'injection ne peut pas être pratiquée; cependant, ce n'est pas le procédé de choix.
 
Le procédé de choix pour administrer l'eau de mer, c'est l'injection intra-tissulaire, l'injection hypodermique ou l'injection intra-musculaire indifféremment.
 
La méthode marine veut que l'on adopte, tout au moins au début du traitement, des doses très faibles et espacées dans l'eczéma du nourrisson, des doses faibles mais plus approchées et habituellement croissantes dans la constipation chronique des entérites. La méthode exige des doses moyennes et sensiblement fixes dans le traitement des diarrhées banales du jeune âge, même dans le cas de grandes hypersécrétions, mais sans faciès cholérique; elle exige, au contraire, des doses très élevées, deux cents fois et plus la dose de l'eczéma, dans le catarrhe intestinal aigu du nourrisson: quand on observe les zones, le liseré, le souffle, les plis et le ventre caractéristiques. La méthode donne ces indications de doses comme des indications formelles, comme des prescriptions nécessaires, comme des faits d'expérience, acquis définitivement.
 
L'interruption prématurée du traitement est presque toujours une décision préjudiciable à l'enfant. Parfois un traitement très court suffit. Tout se passe, dans certains cas, comme si les quelques doses d'eau de mer injectées avaient imprimé au développement de l'enfant une impulsion favorable et définitive. Dans la plupart des cas, il n'en va pas ainsi. Décider du moment où un traitement peut être suspendu de façon opportune est souvent, à mon avis, une des opérations les plus délicates. La plus extrême attention est nécessaire à ce moment.
 
Pratique de la méthode marine 
 
Un enfant, même pris dans la période finale de sa vie, à résolution musculaire prononcée, à pouls non perceptible, à mouvements respiratoires espacés (32, 28, 24, 18, 16), à réflexe cornéen disparu, s'il est injecté du plasma marin, il revient à la vie dans 92% des cas.
 
   
1. ENTÉRITE CHOLÉRIFORME
 
L'entérite cholériforme la plus grave des maladies du tube digestif de l'enfant survient d'emblée ou se déclare subitement au cours d'une gastro-entérite vulgaire. Elle se porte en principe sur les sujets de moins de deux ans, mais frappe parfois des enfants de vingt-sept à vingt-huit mois. Si elle est mal diagnostiquée, quatre à huit jours sont suffisants pour que le décès survienne.
 
Posologie marine 
 
L'entérite cholériforme du nourrisson exige deux injections sous-cutanées de plasma marin par jour, une le matin, une le soir, de 200 grammes chacune, pendant dix jours consécutifs. Après dix jours, si tout va bien, on injectera 200 grammes une seule fois par
vingt-quatre heures pendant huit jours encore. On pourra suspendre alors le traitement intensif, tout en se tenant prêt à le reprendre en cas d'alerte. «Chez les enfants tout à fait voisins de la phase extrême (avec mucosités oculaires, oeil vitreux, dépression cornéenne, atténuation ou abolition du réflexe cornéen, résolution musculaire, pouls radial difficile à percevoir, ralentissement respiratoire), on injectera deux doses de 300 ou même de 400 grammes chacune dans les premières vingt-quatre heures. Ce relèvement, une fois obtenu, on redescendra aux doses habituelles de 200 grammes. Dans tous les cas il sera indispensable de pratiquer deux injections par jour pendant les huit premiers jours, cela quel que soit l'état de prospérité apparent de l'enfant après les premières piqûres. Une interruption ou un ralentissement de traitement sont invariablement suivis d'une rechute grave. L'injection de 200 grammes a une durée d'action d'environ douze heures. Il suffit de ne pas la renouveler pour voir réapparaître après ce temps les phénomènes gastro-entériques jugulés par le plasma». 
 
Régime 
 
Le régime à prescrire à l'enfant est de la plus haute importance et doit être rigoureusement suivi. D'une façon générale, l'injection marine rétablit en moins de deux heures la faculté digestive abolie de l'enfant. Dans de rares cas (15%), l'intolérance digestive persiste après la première injection ou réapparaît en cours de traitement. Cette intolérance cède généralement à l'injection suivante. Si elle persiste, on nourrira l'enfant pendant douze ou vingt-quatre heures au plasma, additionné d'un tiers d'eau. Le plasma est remarquablement bien accepté. On revient au régime original ensuite.
 
Bain 
 
Si par le fait de l'injection la température s'élève à 40°C ou au-dessous, il n'y a pas lieu de baigner l'enfant. La température réactionnelle n'offre jamais de danger.
 
   
2. ENTÉRITES VULGAIRES
 
J'entends par entérites vulgaires toutes les affections des voies digestives du nourrisson autres que l'entérite cholériforme. Elles sont caractérisées par un début moins brusque mais en général insidieux et conduisent l'enfant à l'athrepsie ou à l'atrophie. La méthode marine se résume dans ces cas en deux mots : injecter et nourrir, injecter la dose nécessaire, nourrir de façon suffisante.
 
Régime 
 
Comme dans l'entérite cholériforme, les laits et les farines doivent être d'une excellente qualité.
 
   
POSOLOGIE DE L'EAU DE MER INJECTÉE 
- Entérite sèche (constipation) 
 
Dans les entérites vulgaires à forme sèche (constipation), les premières doses devront toujours être faibles. La constipation offre ce caractère particulier qu'une dose forte est susceptible de l'aggraver; il faut donc toujours commencer par quelques piqûres de 10 centimètres cubes (3 ou 6) et ne monter aux doses plus hautes (30, 50, 100 centimètres cubes) que si les doses faibles n'agissent pas. Aussitôt qu'on possède la dose active, il faut s'y tenir, et ne monter que si elle devient inefficace à la longue. Quand la constipation porte sur un athrepsique ou un atrophique dont l'état général est très bas, il convient de remonter en premier lieu l'état, et d'agir, par conséquent, avec des doses plus fortes (30, 50, 100 centimètres cubes, par exemple).
 
Diarrhées vulgaires 
 
Dans la majorité des cas, les doses efficaces sont les suivantes: six premières injections de 30 centimètres cubes, à raison de trois injections par semaine; injection de 50 centimètres cubes ensuite aux mêmes intervalles. Le traitement ne doit pas comprendre moins de quinze piqûres, même si l'amélioration ou l'apparence de la guérison suit la première injection. Il doit être prolongé au-delà de quinze piqûres si l'affection est rebelle, et plusieurs mois s'il s'agit d'un cas d'athrepsie ou de déchéance organique profonde. Dans 20% environ des cas, les doses de 30 et de 50 centimètres cubes sont insuffisantes, et il convient de monter rapidement à celles de 100 et au besoin de 200 centimètres cubes. On en sera averti d'une façon très simple. Un principe commande les doses. Quand une dose est inefficace, il faut l'élever jusqu'à l'obtention du résultat cherché. On devra s'assurer toutefois que l'insuccès constaté tient bien à l'insuffisance de la dose et non pas à un régime incorrect, à un traitement adjuvant inopportun ou à une autre cause. Si, par exemple, les selles ne s'améliorent pas, si les vomissements continuent, si l'enfant ne se nourrit pas, demeure anorexique et stationnaire de poids, et si ces différentes manifestations morbides ne tiennent pas à des fautes de technique, on augmentera la dose et on diminuera au besoin les intervalles jusqu'à répéter les injections tous les jours.
 
Dans les cas très graves, pré-agoniques, consécutifs à une diarrhée vulgaire, on agira aux doses de 200, 400 et au besoin 600 centimètres cubes par jour, en deux injections espacées d'environ douze heures, pour revenir aux doses de 100, 50 et même 30 centimètres cubes trois fois par semaine, aussitôt que l'état critique sera remonté. En définitive, le maniement des doses et des intervalles est facile; il peut se résumer de la façon suivante: 10 centimètres cubes chez les constipés; 30 et 50 centimètres cubes chez les diarrhéiques; 100, 200 centimètres cubes au besoin dans les cas rebelles. Intervalles de deux ou trois jours entre les injections. Dans les cas extrêmes, agoniques, injections quotidiennes et même bi-quotidiennes aux doses de 200, 400, 600 centimètres cubes par jour, selon la gravité, l'âge et le poids.
 
   
3. LE CAS DE L'INTOLÉRANCE LACTÉE
 
L'emploi de l'eau de mer dans le cas de vomissements
 
Cinq minutes avant chaque repas, on fera boire à l'enfant une cuillerée à soupe d'eau de mer isotonique [ici, Dr. Jarricot implique probablement l'eau de mer pur ce qui est l'eau de mer hypertonique et non isotonique] pure ou diluée au tiers avec de l'eau ordinaire bouillie. Si l'effet antiémétique est insuffisant, c'est-à-dire si les vomissements demeurent totaux ou très importants, on remplacera, pendant deux ou trois jours, une fois sur deux, le repas de lait par un biberon de plasma (deux parties de plasma, une partie d'eau). On évitera du reste d'alterner systématiquement lait et plasma. On ne donnera le plasma à la place du lait que si le repas précédent a été vomi.
 
Les doses d'eau de mer à injecter
 
Selon la forme que revêtent les troubles intestinaux (diarrhée ou constipation), on choisira la dose prescrite pour le traitement des entérites simples, tout au moins pour le début du traitement. On prendra, d'autre part, en considération, ce fait qu'il y a dans l'intolérance lactée du nourrisson un avantage manifeste à multiplier les doses. On n'aura pas égard à l'âge de l'enfant. Sauf constipation extrême, on ne craindra pas d'élever les doses à 200 grammes de plasma par 24 heures, même en l'absence de diarrhée aqueuse, mais en présence de phénomènes généraux justifiant un traitement intensif, tels que vomissements rebelles et grands symptômes d'hyperesthésie gastro-intestinale; du reste, dans ce cas et surtout dans les formes qui rappellent la maladie spasmodique, on se trouvera bien de donner, de suite avant les deux injections quotidiennes, un bain chaud et prolongé.
 
   
4. LE CAS GÉNÉRAL DE LA DÉNUTRITION DU NOURRISSON:
HYPOTROPHIE, DYSTHREPSIE, ATHREPSIE, ATROPHIE
 
II y a une dénutrition quand il existe une assimilation insuffisante ou une désassimilation excessive [ou un manque de nutrition].
 
Traitement de dénutrition de l'enfant
 
Thérapeutique 
 
On appliquera les doses prescrites au titre des entérites banales et à celui de l'intolérance lactée, c'est-à-dire les doses courantes de 30 à 50 grammes de plasma de Quinton, trois fois par semaine. Chez les enfants de très faible poids et de dénutrition profonde, on se trouvera bien de débuter par des injections quotidiennes de 10 centimètres cubes de plasma, pendant une vingtaine de jours au moins. D'ailleurs, si l'amélioration n'est pas prompte et flagrante, même dans ces cas, on élèvera les doses à 30 grammes, 50 grammes, 100 grammes et au-delà. Enfin, dans les cas de cachexie extrême, de mort imminente, on n'aura égard ni à l'âge, ni au poids, et l'on injectera immédiatement une dose forte, 100 grammes de plasma, par exemple ou mieux, deux doses égales, par vingt-quatre heures, sauf œdème. Dans tous les cas, la règle générale est de réduire les intervalles et d'augmenter les doses, si les résultats ne sont pas satisfaisants. En aucun cas, on ne court de risques à injecter une dose forte; si l'on observe parfois, après la première ou les deux premières piqûres, quelques heures de fièvre et d'agitation, il a déjà été exposé que cette réaction était toujours sans danger. Dans les états de dénutrition qui résultent de maladies générales, qui accompagnent les maladies ou qui préparent des complications morbides, la prescription thérapeutique reste la même quant à la méthode marine, sauf si l'on est en présence d'une entérite cholériforme, d'une tuberculose, d'une syphilis et, dans une certaine mesure, d'un eczéma. En se reportant aux titres spéciaux de ce chapitre, où ces cas sont envisagés, on trouvera l'exposé des indications et des doses que la méthode exige. Dans toutes les autres maladies, on se rappellera que le traitement marin ne gêne aucune médication et que, par conséquent, on est toujours autorisé à recourir aux sérothérapies spécifiques, aux traitements généraux de l'infection (colloïdothérapie, etc.), bref, aux ressources générales de la thérapeutique qui viennent se superposer au traitement marin.
 
   
5. LE CAS DE LA TUBERCULOSE DU NOURRISSON
 
Dans tous les cas où l'on pose le diagnostic de terrain tuberculeux (enfants tuberculeux ou d'hérédité tuberculeuse), le traitement débutera par les doses faibles de 10 centimètres cubes de plasma, trois fois par semaine. Cependant, il faut savoir que dans toutes les tuberculoses non viscérales, on devra habituellement recourir aux doses moyennes de 30 et de 50 grammes de plasma trois fois par semaine pour obtenir un accroissement suffisant; par exemple, dans les pseudo-athrepsies tuberculeuses. On doit savoir aussi que dans les mêmes catégories nosologiques, les doses fortes de 100 et de 200 grammes sont habituellement bien supportées et souvent nécessaires pour obtenir l'effet attendu traitement marin.
 
Dans toutes les tuberculoses non viscérales, l'effet de la méthode marine est remarquable. C'est un fait hors de contestation. On voit, par exemple, les ulcérations tuberculeuses de la peau se combler avec une rapidité telle que l'on peut obtenir, en trois semaines, la cicatrisation complète d'ulcérations couvrant en superficie l'étendue d'une pièce d'un franc. Dans les tuberculoses osseuses et dans les tuberculoses ganglionnaires périphériques, l'effet est souvent très rapide aussi. Un traitement adjuvant à recommander est celui du lavage profond des fistules avec du plasma isotonique. L'effet du traitement marin est souvent parfait dans les formes larvées de la tuberculose du nourrisson (dans le type dyspeptique comme dans le type anémique) non compliquées de lésions viscérales.
 
Dans les tuberculoses viscérales, il y a lieu d'établir des distinctions. Quinton estime que le traitement marin est capable de donner des résultats impressionnants dans tous les cas et même dans la tuberculose pulmonaire. Il n'est donc pas jusqu'aux formes les plus graves de la tuberculose du nourrisson qui ne puissent bénéficier de l'eau de mer. Certes, dans les formes envahissantes, dans les broncho-pneumonies comme dans les miliaires, il n'y a rien à attendre du traitement marin; là, tout échoue. Mais, dans le tuberculose pulmonaire, dans l'adénopathie trachéo-bronchique, dans le tabès mésaraïque, l'eau de mer est d'un grand secours. Pour ma part, je me loue d'avoir employé l'eau de mer dans ces tuberculoses profondes et d'avoir pu conserver la vie à des enfants dont la mort était certaine dans les conditions où je les ai observés: fièvre, toux, amaigrissement, réactions intradermiques positives chez des nourrissons de quelques mois. Toutefois, je ne saurais porter un jugement sur la valeur du traitement marin employé seul, à l'exclusion de toute autre thérapeutique, dans ces tuberculoses très graves. Mais il n'est pas douteux pour moi que l'eau de mer apporte au nourrisson tuberculeux, intoxiqué par sa maladie et défaillant, l'aide indiscutable qu'elle fournit dans toutes les infections. Bref, je suis favorable à l'emploi de l'eau de mer, même dans les tuberculoses profondes du nourrisson. La règle, dans ces cas, est de débuter, je le répète à dessein, par les doses faibles de 10 centimètres cubes, trois fois par semaine, et de n'augmenter, le cas échéant, que si la température l'autorise, c'est-à-dire si l'injection n'est pas suivie, dans les huit heures, d'une réaction fébrile, que la forme traitée soit apyrétique ou non avant les piqûres de plasma.
 
   
6. LE CAS GÉNÉRAL DE LA SYPHILIS
 
À lui seul, à l'exclusion de tout autre traitement, le traitement marin peut donner, chez le nourrisson syphilitique ou hérédo-syphilitique, des résultats de premier ordre. Sous son unique influence, les ulcérations, s'il en existe, se comblent rapidement; l'apparence sanieuse s'efface; dès le lendemain de la première ou de la seconde piqûre, le liseré cicatriciel apparaît. Chez le nourrisson spécifique en retard de poids, comme chez l'hypotrophique banal par sous-alimentation, le poids remonte de suite, dans la pluralité des cas. L'accroissement, toutefois, n'a pas toujours l'intensité habituelle. Dans 25% des cas de syphilis, le gain pondéral n'est que de 400 à 600 grammes par mois; du moins, le poids se relève-t-il aussitôt, même s'il était stagnant depuis longtemps. En même temps que le poids se réveille, on voit s'accroître la taille, diminuer l'ectasie veineuse frontale et pariétale. Il est habituel que l'hydrocéphalie continue son évolution pendant les premières semaines du traitement marin; mais bientôt elle se modère à son tour, comme le prouvent les mensurations crâniennes successives (périmètre total, diamètres bipariétal et antéro-postérieur).
 
Le traitement marin du nourrisson syphilitique doit durer de six mois à un an. Conduit avec régularité, le traitement amène peu à peu l'enfant à un état de perfection viscérale qui étonne quand on recherche plus tard les stigmates et que l'on voit sur quel terrain l'action marine s'est exercée. La syphilis du nourrisson s'accommode des doses ordinaires de 30 à 50 grammes de Plasma Marin, trois fois par semaine. Cependant, des doses fortes (100 grammes de plasma, trois fois par semaine) peuvent être nécessaires. Le relèvement du poids demeure le critérium de la posologie.
 
Il est possible de recueillir de nombreuses observations de nourrissons spécifiques, chez lesquels tous les phénomènes morbides ont cédé au seul emploi de l'eau de mer. Mais ce n'est pas à dire que la méthode marine exclusive ne connaisse pas d'échec dans le traitement de la syphilis. Dans un certain nombre de cas, nous avons eu des échecs.
 
   
7. LE CAS DE L'ECZÉMA
 
Les lésions eczémateuses de l'enfant, comme celles de l'adulte, sont essentiellement justiciables du traitement marin. Dans la majorité des cas (60%), la première injection de plasma agit par une exaspération immédiate et momentanée de la lésion qui s'avère et suinte abondamment pendant un jour ou deux, quelquefois trois, pour se sécher et s'atténuer après ce temps. Les injections suivantes déterminent les mêmes phénomènes, plus discrets en général, jusqu'à disparition du suintement, puis de l'érythème. Cette disparition définitive des symptômes morbides se produit dans certains cas, vers la huitième ou dixième injections, parfois un peu plus tard; il existe des formes tenaces.
 
Sur les nourrissons, les six premières injections de plasma doivent être pratiquées à la dose de 10 centimètres cubes. Des doses plus fortes détermineraient une poussée réactionnelle trop vive. Cette poussée réactionnelle est sans inconvénient si l'eczéma siège seulement ailleurs qu'à la face. Il est préférable de l'éviter si les joues, les paupières et la région frontale sont envahies par les lésions. Le suintement abondant qui peut se produire est susceptible d'atteindre les yeux et de déterminer une conjonctivite. Cette conjonctivite est habituellement sans gravité. Il est mieux de l'éviter par l'emploi de doses faibles et par un barrage de pansements humides appliqués en permanence sur les joues et le front.
 
Dans 40% des cas, l'amélioration survient d'emblée, sans poussée réactionnelle. On voit l'érythème diminuer, le suintement primitif s'atténuer, la lésion se sécher, devenir «feuille morte», puis pâlir, enfin disparaître. Si, au contraire, les doses de 10 centimètres cubes ne sont suivies ni d'amélioration, ni de poussée réactionnelle, il convient de passer sans tarder aux doses de 30 centimètres cubes, au besoin de 50 centimètres cubes, de façon à obtenir soit la régression des lésions sans poussée réactionnelle, soit la poussée réactionnelle, toujours curative. Dans tous les cas, on répétera l'injection de plasma trois fois par semaine. Les pansements humides seront faits à l'eau bouillie froide sur les régions atteintes par l'eczéma. On remplacera l'eau bouillie avec avantage par le Plasma Marin dans tous les cas, mais surtout quand les lésions sont à vif.
 
Quand l'eczéma s'accompagne, chez l'enfant, de phénomènes gastro-entériques graves (entérite cholériforme, par exemple, ou entérite aqueuse d'été), on courra au plus pressé; on négligera l'eczéma pour appliquer le traitement à doses massives des diarrhées déshydratantes, en prenant soin simplement de prescrire des pansements humides sur les régions eczématisées. On voit, dans la majorité des cas, l'eczéma s'améliorer et disparaître avec une rapidité surprenante. J'insiste sur ce point, que les doses faibles recommandées par Quiton dans le traitement de l'eczéma n'ont qu'un but, celui de limiter la poussée réactionnelle curative dans les cas d'eczéma de la face. Des doses plus fortes ne sont pas à craindre; leur action est plus énergique, plus prompte; on devra même y avoir recours dans tous les cas où l'amélioration tarde à se produite et dans les cas rebelles où l'eczéma est généralement sec. La règle sera de pousser les doses jusqu'à ce que les lésions suintent sous l'influence des injections; l'amélioration n'est possible qu'à cette condition. Aussi bien, Quinton et Variot ont-ils préconisé autrefois la dose de 30 centimètres cubes d'emblée. Quinton n'a recommandé les injections de 10 centimètres cubes que plus tard, afin d'éviter la légère complication oculaire qui peut se produire chez les enfants atteints d'eczéma de la face.
 
   
8. LE CAS DE LA BRONCHO-PNEUMONIE
 
La broncho-pneumonie du nourrisson est une affection sur laquelle le traitement marin échoue; mais l'eau de mer demeure un adjuvant intéressant, en particulier quand l'enfant est déshydraté par des selles aqueuses. J'ai d'ailleurs combiné au traitement marin un traitement réglé de la broncho- pneumonie du nourrisson. Ce n'est pas ici le lieu de l'exposer. Mais, après un an d'expérience, je ne puis passer sous silence le pourcentage de succès remarquable qu'il m'a donné. Au surplus, on ne saurait nier l'heureux effet de l'eau de mer quand on voit des enfants broncho-pneumoniques continuer à s'alimenter malgré la fièvre, malgré les signes cliniques les plus redoutables et finalement guérir sans perte de poids ou avec une perte de poids insignifiante, aussitôt réparée.
 
   
9. LE CHAPITRE D'ATTENTE DES MALADIES DU SYSTÈME NERVEUX 
 
Je pense que, dans un avenir prochain, il sera possible de montrer quels immenses services peut rendre l'eau de mer dans le traitement des maladies du système nerveux. Il serait prématuré aujourd'hui de parler d'acquisitions définitives comme de fixer les limites de l'action marine sur le vaste domaine de la neuro-pathologie. Mais il est possible d'énoncer déjà quelques faits généraux, un peu disparates malheureusement.
 
Dans toutes les méningites, l'eau de mer est certainement douée d'une action favorable. L'eau de mer, d'abord, soutient les forces du malade, son appétit, son état général. On assiste, en injectant les méningites tuberculeuses à ce fait inattendu que, dans des formes régulières où l'on pouvait prédire avec certitude un amaigrissement continu et intense, l'enfant succombe à l'imprégnation nerveuse au milieu des signes accoutumés, mais sans perdre de poids, sans cesser de s'alimenter aussi longtemps que la déglutition persiste. On devine quel peut être le secours dans toutes les méningites non tuberculeuses où l'on peut superposer un agent thérapeutique d'une telle puissance à une médication spécifique ou aux médications générales de l'infection.
 
Mais il y a plus. L'action marine ne se borne pas à cet effet eutrophique. L'eau de mer est douée de propriétés neurotropes tout à fait évidentes si l'on en juge par les bons effets obtenus chez l'adulte dans les névralgies, les névrites et les paralysies, ainsi dans la névralgie sciatique (Jarricot), dans la névrite alcoolique (Plantiel), et chez l'enfant de tout âge, dans l'énurésie (Plantier, Jarricot), même dans des cas rebelles à tous les autres modes de traitement essayés d'abord.
 
Ainsi voit-on également l'eau de mer faire preuve d'une action favorable dans la paralysie infantile où l'on peut assister parfois à une action unilatérale, du moins à une prédominance attestée par les mesures circulaires du membre atrophié et le retour de la mobilité dans des cas où la fonction semblait à jamais compromise. Je puis citer des résultats du même ordre d'importance obtenus dans l'amyotrophie familiale, la myatonie, la chorée. Je ne connais pas d'indications de s'abstenir par prudence. Je ne connais pas davantage d'indications de s'abstenir par scepticisme.
 
Au reste, comment douter de cette action propre de l'eau de mer sur le système nerveux quand l'observateur voit de ses yeux, et dans un temps relativement court, la tête d'un nourrisson se modifier; l'hydrocéphalie, par exemple, se modérer; l'isocéphalie céder au modelage de la face; la tête dans son ensemble cesser de s'accroître, tandis que la taille continue à augmenter; ou, au contraire, une microcéphalie à pronostic mortel s'atténuer; le cerveau s'accroître et, en même temps, l'intelligence s'éveiller, la parole apparaître, toute la vie psychique s'épanouir?
 

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